Il y a 45 ans, la Chine décidait d’instaurer la politique de l’enfant unique pour éviter de s’effondrer sous le poids de
son explosion démographique. Ce choix a eu le mérite d’offrir à l’économie chinoise ce qu’on appelle le « dividende démographique », à savoir une proportion de chinois en âge de travailler atteignant des records pendant les 40 ans qui ont suivi (près de 70 % de la population totale à son
pic), conséquence de l’effondrement du nombre de personnes dépendantes (peu de séniors et peu d’enfants).
Ce contexte très particulier n’était pas sans risque et rendait nécessaire le développement économique du pays, sous peine de connaitre un désordre social difficilement maitrisable, même pour un pouvoir aussi autoritaire que le Parti Communiste Chinois. La répression dans le sang orchestré en 1989 à la suite des émeutes de la place
Tiananmen en a été la parfaite illustration. Face à une potentielle bombe sociale, Deng Xiaoping lançait alors à sa population en 1992 le fameux : « Enrichissez-vous ! », marquant le véritable point de départ de la fulgurante ascension de la désormais seconde économie mondiale.
Si cette envolée a débuté dans les années 90, elle s’est surtout accélérée à partir de 2001, date à laquelle le pays entre dans l’Organisation Mondiale du Commerce. Fort de coûts de production défiant la concurrence et d’une politique assumée de dumping monétaire, la Chine allait devenir l’atelier du monde en un claquement de doigts, en basant son développement sur ce qu’on pourrait appeler le modèle allemand, à savoir des exportations qui sont passées de 5,9 % du PIB chinois en 1980 à 35 % en 2009, quand la production manufacturière est passée de près de 4 % de la production mondiale en 2000 à 27 % en 2015.
La crise des subprimes de 2008 est venue stopper brutalement cette dynamique, jusqu’à mettre en danger la stabilité politique du pays à l’époque. Face à ce nouveau péril social, les autorités ont décidé de s’appuyer sur un autre modèle, moins vertueux, pour retrouver rapidement le chemin de la croissance : soutenir l’économie en investissant brutalement dans tous les domaines, le tout financé à crédit. Si cela aura permis au pays de donner l’illusion de la poursuite de son inexorable ascension et d’acheter la paix sociale, la fragilité des fondations de l’économie chinoise durant la décennie 2010 s’est révélée depuis 2020… Le pays doit désormais faire face à de très lourdes surcapacités de production et à un endettement des ménages et des entreprises devenu un véritable fardeau, celui-ci étant passé de 135 % du PIB en 2009… à 200 % du PIB aujourd’hui ! Ajoutez à cela un défi de taille qui arrive pour l’empire du Milieu, avec l’explosion de la proportion de chinois de plus de 65 ans à partir de cette année, la Chine aura bien du mal à réaliser son rêve de devenir la première économie mondiale, comme son ascension au cours du début du XXIème siècle pouvait le laisser présager à de nombreux observateurs… Un rêve passe !